
Y A-T-1L DES TEXTES «
SACRÉS
» EN PHILOSOPHIE ? 245
service
de la
guerre, comme
en
témoigne
la
bombe
à
hydrogène.
Les
points
2 et 3
sont tout
à
fait vrais, sauf qu'il
n'y a
pas, qu 'il
n
'existe
pas
une science prolétarienne fondamentalement
contradictoire avec la science bourgeoise» (voir D.
DESANTI,
Les staliniens, op. cit., p. 366).
40
Né en
1913
à
Bucarest, Lucien Goldmann, après
un
séjour
d'un an à
Vienne
où il
suivit
les cours
de
Max Adler
et fit
connaissance avec F«austro-marxisme», vint
à
Paris
en
1934.
Il
y entreprit
un
doctorat d'économie,
une
licence d'allemand
et de
philosophie.
En
1942,
il se
réfugia
en
Suisse
où il
prépara une thèse
de
doctorat
en
philosophie qui
fut
traduite
en
français
sous
le
titre
La
communauté humaine
et
l'univers chez Kant (1948). Après
la
libération,
il
devint chargé
de
recherches
au
CNRS.
En
1959,
il est élu
directeur
à
l'Ecole pratique des hautes
études
et
créa une chaire
de
sociologie
de la
littérature
et
de
la
philosophie.
En
1961,
il
créa
un
centre
de
sociologie de
la
littérature
à
l'Université libre de Bruxelles dont
il
devint directeur en
1964.
Travaillant
sur
la philosophie marxiste,
le
roman, Lukacs, Heidegger
et
Sartre,
il a
laissé,
entre autres, Sciences humaines et philosophie (1952); Pour une sociologie
du
roman (1964);
Marxisme et sciences humaines (1970).
41
Ce jugement
de
Goldmann
est
extrait
de
Marxisme
et
sciences humaines (1970).
Il y
ajoutait que ces « Thèses » constituaient « un des principaux tournants de la pensée occidentale »
(voir
L.
GOLDMANN,
Marxisme
et
sciences humaines, Paris, Gallimard, coll. «Idées»,
1970,
p.
164).
42
II
s'agit
au
départ
d'un
texte publié dans
les
fascicules
4 et 5
de Die Neue Zeit en
1886.
Texte qu'Engels réédita
en 1888 en
brochure avec
un
avant-propos
et en
annexe: Marx ùber
Feuerbach.
43
Quant
à
ce
qui
fit
la
fortune
de ces
«Thèses», Labica avance deux facteurs. Le premier
tiendrait
à la
forme
ou au
genre littéraire similaires
aux
fragments d'Heraclite,
aux
aphorismes
nietzschéens
ou
aux carnets intimes de Valéry: «Le regard étranger découvre, dans l'apparente
spontanéité
de
l'écriture, dans
sa
déconcertante concision,
sa
propre disponibilité
et
comme
une invite
à la
libre coproduction
de
sens».
Le
second tiendrait
à la
considération
du
moment
historique. Selon Labica, celle-ci, en bonne logique, devrait tempérer les élans herméneutiques.
Elle
les
relance plutôt
et se
conforte
de ce que ces
«Thèses»
ne
sont nullement
un
accident
de parcours puisqu'elles
ont été
inscrites
en 1859 par
Marx dans
son
propre itinéraire
philosophique:
c'était
le
moment,
a-t-il
dit, où
Engels
et
lui-même
se
résolurent
à
«régler
[leur] compte» avec leur conscience philosophique d'antan.
Le
moment, allait ajouter Engels
en
1888
-
alors qu'il signalait l'existence de ces « Thèses
»
-
du « germe génial »
d'une
nouvelle
conception
du
monde. Double aveu (Marx, Engels)
de ce que ces
«Thèses», indissociables
du
«manuscrit»
qui les
suivit {Die deutsche Idéologie), représentaient une rupture décisive dans
leur parcours intellectuel. Comme dit Labica, dans
ces
conditions,
on
comprend que
«
la forme
surdétermine
le
contenu» puisqu'un «germe génial»
(la
nouvelle conception
du
monde)
y
serait consigné, mais sous forme d'ellipses
ou de
litote (simples notes jetées rapidement
sur
le papier). Situation paradoxale (conception géniale
du
monde/sous-entendu dans l'expression
de
la
pensée)
qui,
pour Labica, imposerait, par-delà l'accord quasi unanime
de
l'exégèse
sur
V«avènement»
que
constituent
Ad
Feuerbach,
d'en
réalité «n'en faire
ni
trop,
ni pas
assez».
Et trop
en
faire,
ce fut,
entre autres,
y
lire
ce qui ne s'y
trouvait pas,
ce tut y
pousser de force
certains concepts. Mais, comme
le
fait aussi remarquer Labica, inversement, «comment
néanmoins faire abstraction
des
blancs
qui les
suggèrent
et des
fortes lectures
qui les y ont
détectés?» (G.
LABICA,
Karl
Marx.
Les
Thèses sur Feuerbach, Paris,
PUF,
1987, p.
5-8).
44
II
faut toutefois noter qu'en
1850, six ans
après
la
disparition
des
Annales,
un des
fondateurs
de
la Ligue des Justes, devenu membre
de la
Ligue
des
communistes, H. Ewerbeck,
auteur
d'une
anthologie d'écrits allemands d'inspiration athée, traduits
par lui en
français,
fit
une place
à
l'essai
de
Marx
sur La
Question juive (voir Qu'est-ce
que la
Bible d'après
la
nouvelle Philosophie allemande, Paris, 1850).
45
Ce qui veut dire qu'il
y
eut néanmoins quelques réactions publiques.
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