
LES ASSEMBLÉES PLÉNIÈRES DE L'ÉPISCOPAT FRANÇAIS ( 1906-1907) 209
en votant l'envoi
d'une
adresse au pape reconnaissant filialement son enseignement.
L'exercice était rhétorique et ne préjugeait en rien des travaux de l'assemblée dont
les procès-verbaux étaient envoyés au Saint-Siège. Mais ces adresses démontraient
assez nettement la position de l'épiscopat français face au pouvoir de Rome, comme
le montre celle envoyée au pape à l'ouverture de la troisième assemblée
72
.
Au moment où, pour la troisième fois, cardinaux, archevêques et évêques de
France, nous nous trouvons réunis en Assemblée plénière pour délibérer sur les
intérêts de cette noble portion de l'Eglise catholique dont nous sommes les Pasteurs
immédiats, Notre premier besoin est de faire parvenir à Votre Sainteté l'expression
de notre reconnaissance la plus émue, pour le nouveau gage de très paternelle et
apostolique sollicitude qu'EUe a daigné nous donner, à nous, à notre clergé et à
notre bien-aimé peuple, en nous adressant l'Encyclique du
6
janvier.
A
ce sentiment
de gratitude, nous nous empressons d'ajouter l'assurance de notre adhésion entière
et convaincue au jugement porté par Votre Sainteté sur la législation en matière
religieuse, qui a commencé à la loi de 1905 et qui vient de se continuer
par
la loi
du
2
janvier
1907.
(...) Parmi les calomnies dont l'Eglise a été l'objet, ces temps derniers,
il en est une qui visait à la fois Votre personne auguste et les nôtres
:
calomnie que
Votre Sainteté a, sans
doute,
volontairement négligé de relever dans son Encyclique.
Or elle nous est trop douloureuse, à nous, pour que nous puissions nous en
taire.
En
même temps que le Saint-Siège était représenté comme dominé ou influencé, dans
le conflit actuel, par des préoccupations plus ou moins étrangères à son ministère
sacré, n'a-t-on pas osé dire que l'Episcopat français marchait à la suite du Pape avec
plus de discipline que de conviction ? Et que la beauté du spectacle de notre union
s'amoindrissait de la passivité de notre obéissance ? A cette calomnie dont nous
sommes blessés, nous répondons qu'en fait historique comme en droit divin,
c'est
assez au Pape de confirmer ses frères sans les absorber. Et cela dit forts de l'union à
laquelle Votre Sainteté a donné sa louange, éclairés de vos lumières, encouragés et
soutenus de vos bénédictions, nous commençons nos travaux dans la plénitude de
notre
liberté.
En terminant, Très Saint
Père,
nous demandons à
Votre
Sainteté qu'Elle
nous
permette
de
redire,
à la
face
des égarés qui nous
calomnient
combien nous
aimons
notre pays
:
soumis à ses institutions, respectueux du pouvoir, nous saurons toujours
faire à la Patrie tous les sacrifices compatibles avec notre foi et
notre
honneur.
Les théories de l'épiscopat français, quant à la répartition du pouvoir au sein
de l'Eglise, ne pouvaient être plus solennellement exposées : reconnaissance de
l'infaillibilité du pape et de son pouvoir sacré, mais affirmation de celui des évêques
teinté de gallicanisme et de patriotisme. Etre évêque,
c'était
diriger l'Eglise, mais
aussi appartenir à son pays, ce que Rome ne pouvait accepter dans le conflit qui
l'opposait au gouvernement français.
La clôture des assemblées : une certaine idée de la France
Le secret qui entourait le déroulement les débats des évêques ne manquait
pas d'aiguiser les fantasmes. Mais le rituel des assemblées ne se limitait pas
aux délibérations. Ces réunions plénières, comme champ du pouvoir religieux
officiellement institué, se prolongeait dans deux directions : celle du spirituel et celle
du temporel. Ainsi, les débats des assemblées s'ouvraient par un appel à l'Esprit-
Saint, se déroulaient à huis-clos, mais s'achevaient par un acte public solennel.
La publicité et la solennité devaient tendre à assurer l'irréversibilité des actes de
Comentarios a estos manuales