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106 LA SACRALISATION DU POUVOIR
et un bonnet de velours noir à deux cornes, garni de fourrures. Les rabbins portent,
comme les y oblige le règlement très strict du Grand Sanhédrin, un manteau de soie
noire, muni d'un rabat également, ainsi qu'un tricorne - un ornement vestimentaire
dont ne sont plus guère affublés que les ecclésiastiques, à l'époque
3
. Tous ont l'épée,
sauf les membres laïcs
4
. Sur d'autres gravures d'époque - mais peut-on s'y fier? -,
ils semblent poudrés et portent perruque.
Le texte du décret impérial du 30 mai 1806 est gravé et suspendu dans la salle
;
de
même, on y a placé le buste de l'Empereur. L'austérité de la scène, son caractère sacral
proclamé, les costumes, le faste, les honneurs militaires, les roulements de tambour,
les prières inaugurales, tout ce décorum et cette théâtralité impressionnent le public
présent et contrastent avec le chahut habituel des réunions juives.
Des hommes humiliés par l'histoire ne pouvaient qu'avoir de la reconnaissance
pour celui qui semblait faire tant d'honneur en leur offrant une voix refusée jusque-là
et en les investissant d'une mission proprement historique - même si c'était plus à
son profit qu'au leur et si cette mission se remplissait sous très étroite surveillance.
L'Empereur invitait ainsi
le
judaïsme à paraître au grand jour, à sortir des ténèbres de
la synagogue.
On se rappellera à ce propos la réponse du doge de Venise obligé de venir déposer,
à Versailles, aux pieds de Louis xiv, les excuses de sa République. On lui demandait
ce qui avait le plus excité son etonnement au milieu de cette cour somptueuse et
grandiose
:
«De m'y voir», répondit-il
5
. Sans doute les membres de l'Assemblée des
notables et du Sanhédrin convoqués par l'Empereur durent-ils éprouver un sentiment
analogue.
Napoléon n'est pas physiquement présent à l'ouverture du Sanhédrin, il mène
campagne en Pologne, où il a, la veille, remporté la bataille d'Eylau contre les
Russes. Mais il est loin d'être absent - son buste offert en permanence aux regards
le rappelle. Peut-être peut-on oser un parallèle? Le jour de Pâques 1802, alors que le
premier consul Bonaparte échange aux Tuileries les ratifications du traité d'Amiens,
le Concordat est publié dans toutes les rues de Paris. Napoléon se rend à Notre-Dame,
suivi d'un imposant cortège. Une haie de militaires borde la route des Tuileries à la
Cathédrale. L'archevêque de Paris reçoit le Premier consul à la porte de l'église et
lui présente l'eau bénite; il conduit ensuite le chef de l'Etat sous le dais, à la place
qui lui est réservée. Peut-être cette image est-elle présente à l'esprit de membres du
Sanhédrin en cette solennité du 9 février 1807, qui amenuise quelque peu le fossé
immense séparant l'Eglise de la Synagogue.
La Révolution avait voulu régénérer les juifs. La convocation de l'Assemblée
des notables juifs, représentation de la Nation juive, et surtout la convocation du
Grand Sanhédrin, voulu comme représentation doctrinale du judaïsme, c'est bien
plus que cela. Napoléon se propose non seulement d'assurer la régénération des
juifs,
mais aussi la résurrection de la Nation
juive,
cette antiquité. C'est en tout cas ce que
rapporte le chancelier Etienne-Denis Pasquier
6
, et il semble qu'il est là au cœur du
projet napoléonien - David Friedlànder, depuis Berlin, considérait le Sanhédrin de
Napoléon comme un spectacle offert aux Parisiens
7
, le spectacle d'une secte et d'un
tribunal religieux surgissant de l'Antiquité romaine par la magie de la volonté d'un
Empereur dominant l'histoire.
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