
LA LOI DU SACRILÈGE DANS LA FRANCE DE LA RESTAURATION ( 1825) 131
Par ce moyen, constate Portalis, le haut rang que tient la religion dans
l'organisation sociale sera plus manifeste aux yeux de
tous.
La sérénité et l'élévation
des peines portées contre les violateurs de la sainteté des temples deviendront un
solennel hommage rendu par la loi à
la
religion
de
l'Etat
9
.
Le renforcement des peines était censé satisfaire ceux qui désiraient que
profanation et sacrilège soient sévèrement réprimés, même si, précisait le rapporteur,
les deux mots ne figuraient pas dans la loi « parce qu'ils n'ont pas d'acceptation
légale déterminée, et qu'ils ne sont en eux-mêmes que des expressions abstraites et
morales, destinées plutôt à caractériser un ordre général d'idées que tel ou tel fait en
particulier »
l0
. Le 30 avril 1824, la Chambre des pairs est saisie du projet de loi issu
de la Commission. Plusieurs prélats montent à l'assaut. Le cardinal archevêque de
Sens n'imagine pas que l'on puisse hésiter à qualifier de profanation et de sacrilège le
vol des vases sacrés ; il exige en outre deux lois distinctes l'une pour la seule religion
d'Etat, l'autre relative aux autres cultes reconnus. L'évêque de Troye réclame lui
aussi l'insertion du mot sacrilège. Un seul intervenant, le marquis de Lally-Tolendal
exprimera le souhait que la loi ne prononce pas la peine de mort. Ces diverses
propositions seront repoussées, mais le
1
er
mai, jour du vote, on modifiera à nouveau
l'article 2 en ajoutant une proposition susceptible de rencontrer l'adhésion des plus
exigeants en remplaçant « enlèvement et tentative d'enlèvement » des vases sacrés
par la mention « avec ou même sans effraction du tabernacle ».
Voté à une écrasante majorité, le texte resta cependant en carafe
!
Il sera représenté
à la Chambre des pairs le 4 janvier 1825 ! Entre-temps, le projet avait été remanié
une fois de plus. Indiscutablement, le poids de la hiérarchie ecclésiastique s'était fait
pressant dans la coulisse et le nouveau souverain n'y avait pas été insensible. Plus de
trois mois s'écouleront encore avant que la loi ne soit sanctionnée par le roi le 20 avril
1825 (annexe II).
Le projet de loi est désormais structuré en quatre titres.
i. Du sacrilège (articles
1
à 6) ;
n. Du vol sacrilège (articles 7 à 11) ;
ni.
Des délits commis dans les églises ou sur les objets consacrés à la religion
(articles 12 à 15) ;
iv. Dispositions générales (articles 16-17).
Quant au fond, deux modifications significatives sont apportées, quoique la
seconde touche plus à la forme, même si elle est très symbolique.
Le sacrilège est défini comme « profanation des vases sacrés et des hosties
consacrées » ; la peine de mort est prévue pour le coupable, assimilé à un criminel,
moyennant deux circonstances aggravantes : les vases renferment des hosties
consacrées au moment du forfait et ce dernier est accompli publiquement. En fait, les
six articles du titre I
er
détaillent ce qu'il faut entendre par profanation.
Le gouvernement
ne
souscrit pas à la demande formulée l'année précédente quant
au dépôt de deux lois distinctes, l'une relative à la religion d'Etat, l'autre relative
aux autres confessions reconnues. Toutefois, il innove. Les trois premiers titres ne
concernent que la religion catholique ; les autres religions « légalement » établies sont
reléguées dans le titre rv « Dispositions générales
»
- (article 17) et ne sont concernées
que par les titres n et m (articles 7 à 15).
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